LE FIASCO DE L'ASSURANCE MALADIE
French article ; English version below
Réformer la santé et l'assurance maladie est devenu l'une des priorités de la présidence Obama.
Monsieur Obama prétend vouloir faire adopter une réforme de la santé d'ici Noël.
Mais cela paraît totalement irréaliste, car les obstacles à son plan sont nombreux, tout comme le sont ses propres contradictions.
Il y a deux jours, Mister O. a vivement encouragé la Chambre des Représentants à adopter un projet de réforme d'ici la fin du mois de juillet, qui couvrirait les 46 millions d'Américains qui n'ont aucune couverture maladie.
Se tenaient alors à ses côtés, Joe Biden, le vice-président, ainsi que d'autres Démocrates, dont la présidente de la Chambre des Représentants, Nancy Pelosi.
Cette dernière a alors promis au président de tout faire pour exaucer son voeu !
"Notre but est d'avoir une Amérique en meilleure santé. Notre proposition de loi sera discutée en séance dès la fin du mois de juillet, j'en suis certaine."
Ah ! Ah ! Ah !
Mais qui peut encore croire Madame Nancy Pelosi quand elle parle, aujourd'hui ? Après tous les mensonges qu'elle a proférés sur les méthodes plus que discutables utilisées par l'administration Bush pour interroger les suspects terroristes ? Rappelons qu'elle a osé affirmer, pince-sans-rire, qu'elle n'était au courant de rien, et cela même alors que tout le monde sait très bien que les élus Démocrates ont été les complices de l'administration Bush et étaient parfaitement au courant des tortures et des violations des droits de l'homme.
Alors maintenant, ce n'est que le même genre de mensonge qu'elle profère, quand elle affirme pouvoir réaliser une vraie réforme de l'assurance maladie très prochainement. On sait parfaitement que les Démocrates sont très divisés entre eux sur la question, et les querelles sont vives entre ceux que l'on appelle les Démocrates modérés et ceux situés les plus à gauche du Parti.

En réalité, la réforme que propose le gouvernement a trois objectifs, mais le problème c'est que chacun de ces trois objectifs est en contradiction totale avec les deux autres :
- fournir une couverture maladie aux 46 millions d'Américains qui n'en ont aucune ;
- garantir le droit de chaque citoyen à choisir son médecin ;
- réduire les coûts du système actuel, qui est devenu plus que cher et bien plus cher que tous les autres pays développés (environ 17 % du produit national brut, alors que dans les autres pays il n'est que de 10 %).

Des analystes indépendants estiment que cela coûterait 1,5 trillion de dollars sur dix ans de créer une couverture maladie universelle - et cela dans une période où les déficits budgétaires explosent déjà et menacent d'engloutir les finances gouvernementales. Pour compliquer encore un peu plus toute cette affaire, le gouvernement a annoncé cette semaine que le fond qui finance Medicare, qui permet aux personnes âgées d'avoir une sécurité sociale, sera totalement épuisé en 2017.
Le problème est donc évident :
où Mister O. pense-t-il trouver l'argent pour sa réforme ?
Le Congrès examine un projet qui taxerait les cotisations que versent les employeurs pour leurs employés, ce qui signifie que ces derniers seraient obligés de payer un impôt supplémentaire. Cela rapporterait 250 milliards par an. Mais cela signifierait que ceux qui ont une couverture sociale paieraient pour ceux qui n'en ont pas, une idée à laquelle Obama s'était déclaré hostile lors de la campagne présidentielle, lorsque son adversaire John McCain l'avait évoquée.
Une autre proposition, soutenue par Mister O., serait de créer un système d'assurance maladie publique qui serait en compétition avec les assurances privées. Le fait d'être mis en concurrence permettrait en théorie, de réduire les coûts et d'étendre le nombre de personnes couvertes.
Mais les assureurs et les acteurs du système de santé sont opposés à cette proposition.
Les supporters du président situés à gauche de l'échiquier politique demande la création d'un fond public parallèle aux assurances privées. Howard Dean, ancien secrétaire général du parti démocrate et ancien prétendant à la nomination pour l'élection présidentielle de 2004, a d'ores et déjà fait savoir qu'il s'opposera farouchement à toute réforme du système qui ne reposerait que sur l'assurance privée.
"Si la réforme ne prévoit pas une assurance publique, alors cela n'aura rien d'une réforme", a-t-il déclaré lors d'une conférence cette semaine organisée sur le sujet par le groupe MoveOn.org.
Cependant, Obama n'a pas exclu de laisser les compagnies d'assurance gérer le système, à la condition que cela permette de faire baisser les coûts et de fournir une couverture maladie à plus de gens.
C'est bien là le noeud du problème : plus le Congrès laissera le champ libre au privé, plus le projet a de chances d'être adopté (car il sera alors approuvé par les Républicains modérés et les Démocrates les plus conservateurs, sans qui la réforme ne pourra pas être adoptée), et moins il y a de risques de provoquer la colère des acteurs de la santé.
Mais, revers de la médaille, cela ne manquerait pas de provoquer la colère des plus ardents supporters de Obama pendant la campagne. Difficile de plaire à tout le monde !
Toutes ces difficultés et ces contradictions me rappellent vraiment la tentative infructueuse de Hillary Clinton de réformer l'assurance maladie en 1993, quand elle était Première dame. Tout le monde lui reprocha alors de ne pas avoir été capable de proposer un plan acceptable, et elle fut même accusée par certains Démocrates d'être responsable de la sévère défaite qu'enregistra alors le parti aux élections législatives de 1994.
Maintenant, je suppose que ces mêmes Démocrates qui l'ont tant blâmée à cette époque, sont en train de se rendre compte que leur héros n'est pas superman, car il ne semble pas du tout capable de proposer quelque chose de mieux que son ancienne rivale lors des primaires démocrates.